La voix de Mikalayi

A la rencontre des Balunda da Mikalayi – Lettre de Abbé Kalonji

Mikalayi 18/11/2020

 

Un matin du douze juillet deux mille douze, une rencontre désintéressée s'est effectuée à la procure des missions de l'archidiocèse de Kananga avec un groupe des touristes venus de l'Europe, précisément de la Belgique, à la découverte du Congo. Des bouches de plusieurs congolais présents à la procure, une même question revenait : « Qui sont ces blancs ?».  Une question qui a demeuré pendant quelques temps seulement sans réponse car à cette époque-là personne de nous n'avait pensé leur poser quelques questions.

Le temps faisant son cours, nous apprenions que les blancs rencontrés à la procure de Kananga avaient pour destination Mikalayi à la découverte de la terre natale des certains d'entre eux.

Une information qui a suscité étonnement et admiration en raison du coût de voyage : titre de voyage et le séjour. Le coût du voyage ne s'étant pas présenté comme un handicap à la réalisation du rêve de voir la terre natale. La lecture de l'évènement renseigne un attachement à ce coin où on a vu, pour la première fois, la lumière du soleil et la succession des jours.

Ce coin, cette terre natale c'est Mikalayi qui est la première mission catholique au Kasai fondée en 1891 par les missionnaires belges de Scheut.

Dans la vision évangélisatrice, les missionnaires, en apportant l'évangile au peuple Kasaïens, ils s'étaient assignés un objectif de promouvoir l'évangélisé en lui apprenant à lire et à écrire. Pour y parvenir, à l'aube de l'évangélisation, plusieurs écoles ont été construites à Mikalayi. Il s'agit de l'institut Mfuki (l'école normale), lycée Tusadile, Institut Saint Dominique Savio, Ecole primaire Mapolo, Ecole primaire d'application Mfuki et l'école des infirmiers ou institut technique médical (ITM en sigle).

L'évangélisé qui devrait apprendre à lire et à écrire devrait être en bonne santé pour continuer l'apprentissage. A cette époque, beaucoup de maladies parmi lesquelles la malaria, la maladie du sommeil … décimaient la population.

Pour combattre ces maladies, un hôpital a été construit à Mikalayi qui devrait prendre en charge tous les malades de l'espace Kasaï.

En voulant faire de Mikalayi un petit paradis sur terre où il faisait beau vivre, on avait construit une centrale hydro-électrique qui faciliterait la vie en dissipant les ténèbres et en rendant possible l'usage de certaines machines à l'hôpital, dans les écoles et certains ménages.

Mikalayi éclairé donnait la joie d'y vivre.

Les pionniers de la génération de Mikalayi paradis ont gardé des bons souvenirs et les ont racontés à leurs descendants. C'est le cas de Médard Delrue (Professeur à l’institut Mfuki, 1952 - 1960) et Germaine Cosaert (son épouse), qui racontèrent à leurs enfants : Hans Delrue (1956), Henk Delrue (1957) et Piet Delrue (1959) qui a quitté la terre des hommes.

C'est dans l'objectif de rapprocher les souvenirs narrés par les parents à la réalité actuelle que les natifs de Mikalayi se sont fait accompagner de leurs amis pour voir leur village natal. Oh, quelle découverte à fouler sa terre natale ?

Du rapprochement des souvenirs à l'effectivité actuelle, il ressort que Mikalayi n'est plus éclairé, les facilités d'autrefois n'existent plus aujourd'hui.  Le constat amer de l'état ténébreux du village natal de nos frères leur fait prendre, librement, une décision salutaire pour toute la population de Mikalayi, de lui donner de nouveau de l'électricité.

Dès leur retour en Belgique, les frères Hans et Henk ont tenu leur promesse et ont fondé officiellement la société Balunda ba Mikalayi, avec le but de restaurer la turbine hydro-électrique à Mikalayi.

Le 26/08/2018, une correspondance de Mgr Marcel Madila me destinée, déposée à la paroisse où je restais lors de mon séjour de Kananga, m'annonçait ma nomination comme curé à la cathédrale Saint Joseph de Mikalayi. Dès lors commençait un questionnement sur le nouveau champ d'apostolat et les perspectives d'avenir en rapport avec les recommandations de la nouvelle nomination. Commence alors la nouvelle aventure de Mikalayi

A l'arrivée à Mikalayi, j'apprends qu'il existe un comité local des Balunda ba Mikalayi dont l'origine est en Europe. A l'instant même je n'ai pas mordu à la chose, ne me sentant pas directement intéressé car le train était déjà en marche et ne sachant pas sa destination. Après quelques temps j'ai pris mes vacances comme je ne les avais pas encore prises. A mon retour des vacances, invité à la réunion du comité local des Balunda ba Mikalayi, on m'a appris que j’ai été choisi président du comité local des Balunda ba Mikalayi. Quelle surprise ? C'est le début des relations directes avec le comité local des Balunda ba Mikalayi et sa structure mère qui est en Belgique.

Au bout de quelques temps se profile à l'horizon l'arrivée de Jan Vermeyen comme délégué des Balunda ba Mikalayi de la Belgique pour la déconnexion et la prise des mesures pouvant permettre à la construction de la nouvelle turbine. Son arrivée à Mikalayi fait prendre conscience du sérieux de ce projet.

Un événement qui fait dissiper l'incertitude et affermir l'espoir de la population de Mikalayi c'est l'arrivée de l'équipe consistante des Balunda ba Mikalayi venue de la Belgique, constituée de Kris Nelissen, Dirk Van Roy, Jan Heyrman et Henk Delrue qui est né à Mikalayi. Avec cette arrivée, la population a vu la détermination avec laquelle les nouveaux venus ont travaillé pour démonter les anciennes machines, les évacuer afin de laisser la maison prête à accueillir la nouvelle turbine. En plus de la détermination au travail, la population de Mikalayi a fait l'expérience de la gentillesse, de la sympathie de l'équipe qui est arrivée.

Par la prise des photos, le rapprochement de la population, le sourire, cette dernière est convaincue à ce jour qu'il y a les Balunda ba Mikalayi, présents en Belgique qui pense à elle.

Fréquemment, la population reçoit, par notre entremise les messages de réconfort, d'encouragement venant des Balunda ba Mikalayi de la Belgique

Le contact régulier et sincère avec Henk Delrue, fondateur de la société Balunda ba Mikalayi, et Jan Heyrman, membre du conseil d’administration, a supprimé la distance qui sépare Mikalayi de la Belgique. Avec admiration, la population de Mikalayi parle de nos frères qui sont en Belgique. Cette attention particulière et soutenue au bien-être de la population de Mikalayi nous est allée tout droit au cœur et nous pousse à dire avec toute la population de Mikalayi « Kolayi bobo bu musuasua bu ngindu bu tshiamua tshia mu ditanda. Mubi kanumunyi » (Soyez très forts comme les termites, comme le fer de l'atelier. Que le mauvais ne vous voit.)

Au nom de ces relations que tissent Mikalayi et les Balunda ba Mikalayi, nous ne pouvons que nous soutenir et nous unir solidement pour une réussite commune.

                                        

Abbé Léon Kalonji - Mikalayi